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Samedi 7 mai, Ricardo, 27 ans, a été battu par des agents de police de la zone Zaventem. Ricardo se rendait à un festival de musique organisé contre un centre fermé. Moins de dix jours auparavant, un jeune homme, à Gand, reçut des coups qui nécessitèrent neuf points de suture après une rencontre avec la police. Violences policières inutiles et injustifiées, s’est-il avéré. Chaque semaine, des messages de pareils incidents nous parviennent. Incidents au cours desquels un policier (ou une policière), non seulement va au-delà de l’exercice de ses fonctions, mais maltraite et bat des citoyens. Des citoyens qui, jusqu’à preuve du contraire, sont innocents.

D’où une première question: qu’avez-vous fait contre cela et quelles mesures comptez-vous prendre? Ou pensez-vous peut-être que chaque citoyen représente une source potentielle de danger ?

Vous demandez que votre politique répressive ne soit pas payée par le citoyen. Que dois-je donc penser ? Que c’est juste, non ? Néanmoins, le budget de la police est tout de même constitué des impôts de ces mêmes citoyens…

Je ne veux personnellement pas que les impôts que je paie soient utilisés par la police afin d’envoyer des gens à l’hôpital. Nous avons déjà dû trop attendre pour une réforme de la police. “Une police préoccupée par la communauté et qui améliore les services aux citoyens”, telle fut là la promesse adressée à la population civile. Qu’en est-il advenu ?

Lorsque deux agents se trouvent légèrement blessés lors d’une escarmouche avec des jeunes à Hofstade, vous répondez fermement et rapidement. « Celui qui se comporte mal a de la malchance. » avez-vous dit dans les médias à propos de ces jeunes. Vous n’avez jamais fait montre de compréhension envers les causes de cette agressivité juvénile. Vous avez même été en première ligne pour appeler à la tolérance zéro. Votre tolérance zéro va-t-elle résoudre les problèmes socio-économiques de ces jeunes ?

Vous êtes également en première ligne pour défendre la mise en place de plus de barrières, la construction de murs plus hauts et l’installation de plus de caméras de surveillance. Des milliers d’euros furent investis à ces fins. Cela signifie investir dans le «blocage» et la protection d’un petit groupe, et dans l’exclusion de ceux que vous jugez problématiques… Et une bonne partie de la police pense apparemment la même chose que vous.

Le fait que vous encouragiez ardemment de tels investissements est une affaire dommageable mais en aucun cas nouvelle. Si l’on regarde votre histoire avec attention et considération, nous reconnaissons que c’est là, en fait, votre genre de politique : contrôler et sanctionner.

Mais allez-vous aussi sanctionner ces agens qui ont battus Ricardo et Ken ? Pourquoi vous taisez-vous là-dessus ? Comment se fait-il que des accidents de ce genre, que vous dites « isolés », arrivent tant ? Où est la police axée sur le bien-être de la communauté ? Où est le policier qui a d’abord et avant tout agi de façon préventive ? Où sont les agents qui peuvent agir durement mais qui savent aussi réagir comme des travailleurs sociaux en cas de besoin ? Après tout, ils ont quand même affaire, dans leur travail, à des gens, et même souvent de jeunes gens.

Vous aurez sans doute entendu parler de la confiance que « les gens » accordent encore à la police (même presque plus qu’aux politiciens). Et je pense que vous êtes bien conscients du racisme de la plupart des agents. Il suffit de penser aux dernières enquêtes policières à Anvers. Vous savez combien les jeunes de grandes villes se sentent systématiquement ciblés et discriminés.

Pourquoi ne vous entendons-nous jamais sur la question ? Ne sont-ce donc pas des problèmes selon vous ? Ou ça ne vous gêne pas vraiment ? Le cas contraire, s’il-vous-plaît, faites-moi savoir ce que vous comptez faire.

Viser, stigmatiser et discriminer la jeunesse, vous avez réussi. Je me demande si vous êtes capable, pour une fois, de faire un pas dans l’autre direction et de protéger les jeunes qui sont injustement malmenés. Les citoyens qui paient leurs impôts veulent ce que la police maintien de l’ordre, mais aussi des mesures contre les policiers responsables de ces actes de lâcheté.

Madame la Ministre, s’il-vous-plaît, ne nous promettez pas un changement de politique. Nous avons entendu cela trop souvent. Nous ne voulons pas non plus d’une réforme qui ne constitue pas une fin en soi. Vous ne pouvez finalement pas faire autre chose que de reconnaître que ni la police ni les tribunaux ne fonctionnent correctement.

Peut-être devriez-vous tout simplement investir plus dans les gens. Dans des gens mieux instruits et mieux encadrés. Cela serait plus productif. Et ça commence d’abord avec les agents de police. Afin qu’ils soient réellement capables de travailler pour la collectivité. Afin qu’ils soient aussi capables de travailler avec les jeunes. Et qu’ils soient enfin capables, aussi, de travailler dans une ville multiculturelle. Ce n’est que lorsque vous vous en rendrez compte que le service aux citoyens pourra s’améliorer.

En attendant vos réponses avec curiosité.

Un citoyen.

Bleri Lleshi travaille comme superviseur à l’association Alba à Bruxelles. Il a écrit cette lettre en son nom propre.

Traduit du néerlandais par Dimitri Benoît Tuttle

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